L'étreinte des étoiles - 3

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Andréa regarda longuement Adrastos, désormais privé de ses souvenirs par l'effet dévastateur du poison. Elle sentit son cœur se serrer à la contemplation de ce visage qu'elle aimait, maintenant absent, dépossédé de ce qui faisait son essence même. L'homme qu'elle avait aimé n'était plus. En échange, elle se retrouvait face à un homme nouveau, un tableau blanc qu'elle se devait de modeler à sa guise. Choisissant de faire fi de la culpabilité qui tentait de l'assaillir, elle décida d'assumer son choix. Adrastos était à présent son pion, sa seule chance d'éviter la guerre à venir. Avec une vigueur renouvelée, Andréa se mit à l'œuvre. Munie de sa tablette et de tout le contenu enregistré sur l’histoire ancestrale de Mars, elle commença à le ré-éduquer, créant de toutes pièces un Adrastos idéaliste et pacifiste qui chercherait à réconcilier les peuples hostiles et à empêcher la guerre. Jour après jour, elle lui murmurait des anecdotes historiques, des citations de chefs de paix célèbres, des philosophies respectables des anciennes civilisations interstellaires. À chaque mot, chaque phrase, elle tissait un nouveau Adrastos, un véhicule pour sa mission de réconciliation. Parallèlement, Andréa a continué à développer sa technologie, explorant ses applications non seulement pour l'amnésie, mais aussi pour la diminution de l'agressivité et le renforcement des sentiments de compassion et de tolérance. Cela était un défi de taille, mais elle était déterminée à voir son plan se réaliser ; pas seulement pour son peuple, mais aussi pour Adrastos. En lui, elle voyait un potentiel inconnu, une possibilité de faire ce qu'elle n'avait pas pu faire : aimer, sans crainte des conséquences. Mais malgré tous ses efforts et sa détermination, il y avait une certaine solitude dans les yeux d'Adrastos qui la hantait. Elle reconnaissait cet éclat, pour avoir vu la même lueur dans ses propres yeux de nombreuses fois dans le miroir. Malgré tout ce qu'elle était en train d'accomplir avec lui, elle ne put s'empêcher de se demander si ce qu'elle avait fait était juste. Avait-elle le droit de disposer ainsi de la vie d'un autre être, même pour une cause aussi juste ? Chaque jour, alors qu'elle se tenait devant lui, elle ne pouvait s'empêcher de se poser cette question. Et chaque jour, la réponse semblait de plus en plus incertaine.